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Saturday, September 18, 2010

Voyageur

Combien ces vaisseaux, entourés d'eau de tous côtés, lui étaient supérieurs! Ils flottaient; la mer salée les menait partout où il leur plaisait d'aller. En les contemplant, il sentait un courant de sympathie venir à lui de ces énormes masses; elles étaient chargées d'un message à son adresse. Mais, au commencement, il ne comprit pas ce message; et puis il trouva le mot juste dont il fallait qualifier la nature de ces bateaux: c'était "superficiel": ils restaient à la surface de l'eau. C'est en cela que résidait leur puissance. Le danger pour un bateau, c'est d'aller au fond des choses, d'échouer. Les vaisseaux sont creux, c'est le secret de leur existence; les plus grandes profondeurs sont à leur service tant qu'ils restent creux.

(Karen Blixen, extrait // excerpt, Contes d'Hiver)

Wednesday, September 2, 2009

Errant

"Non, il pense qu'en vérité il a toujours habité dans cette
ville-là, qu'il y est né et qu'il y a été élevé.
Quoi d'étonnant si l'esprit ne se souvient pas de ses anciennes
demeures, qu'il habita et où il naquit jadis,
Puisque ce monde, à l'instar du sommeil, le recouvre, comme
les nuages qui recouvrent les étoiles;
D'autant qu'il a parcouru tant de cités et que la poussière
n'a pas été encore balayée de sa faculté de perception
Et qu'il n'a pas fait non plus d'ardents efforts pour que son
cœur devienne pur et contemple le passé,
De telle sorte que son cœur puisse jeter un coup d'œil par
l'ouverture de ce mystère et puisse voir ouvertement le
commencement et la fin."

(جلال الدین محمد بلخى, extrait // excerpt, مثنوی معنوی, trad. inconnue // unknown transl.)

Sunday, July 13, 2008

Transition

Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides;
Va te purifier dans l’air supérieur,
Et bois, comme une pure et divine liqueur,
Le feu clair qui remplit les espaces limpides.
Derrière les ennuis et les vastes chagrins
Qui chargent de leur poids l’existence brumeuse,
Heureux celui qui peut d’une aile vigoureuse
S’élancer vers les champs lumineux et sereins;
Celui dont les pensers, comme des alouettes,
Vers les cieux le matin prennent un libre essor,
- Qui plane sur la vie, et comprend sans effort
Le langage des fleurs et des choses muettes.

(Baudelaire, extrait // excerpt, Elevation)

Thursday, June 19, 2008

Competition

Shortly after my return from the Eleventh Voyage, the papers began to devote increasing space to the competition between two large washing-machine manufacturers, Newton and Snodgrass.

It was probably Newton who first marketed washers so automated that they themselves separated the white laundry from the colored, and after scrubbing and wringing out the clothes, pressed, darned, hemmed, and adorned them with beautifully embroidered monograms of the owner, and sewed onto towels uplifting, stirring maxims such as "The early robot catches the oilcan". Snodgrass's response to this was a washer that composed quatrains for the embroidering, commensurate with the customer's cultural level and aesthetic requirements. Newton's next model embroidered sonnets; Snodgrass reacted with a model that kept family conversation alive during television intermissions.

Newton attempted to nip this escalation in the bud; no doubt everyone remembers his full-page ads containing a picture of a sneering, bug-eyed washer and the words: "Do you want your washing-machine to be smarter than you? Of course NOT!" Snodgrass, however, completely ignored this appeal to the baser instincts of the public, and in the next quarter introduced a machine that washed, wrung, soaped, rinsed, pressed, starched, darned, knitted, and conversed, and -- in addition -- did the children's homework, made economic projections for the head of the family, and gave Freudian interpretations of dreams, eliminating, while you waited, complexes both Oedipal and gerontophagical.

(Stanislaw Lem, extrait // excerpt, Further Reminiscences of Ijon Tichy, "(The Washing Machine Tragedy)", trad. du polonais // transl. from Polish J. Stern & M. Swiecicka-Ziemanek)

Friday, January 18, 2008

Ailleurs

Mon enfant, ma soeur,
Songe à la douceur
D'aller là-bas vivre ensemble!
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble!
Les soleils mouillés
De tes ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traitres yeux
Brillant à travers leurs larmes.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.

(Baudelaire, extrait // excerpt, L'invitation au voyage)