Tuesday, June 10, 2008

Promotion

Quant à toi, mort, et toi, amère étreinte de la mortalité...il est vain d'essayer de m'effrayer

Pour accomplir sa tâche sans sourciller arrive l'accoucheur,
Je vois la main experte qui presse, reçoit, soutient,
Je m'étends au seuil des exquises portes flexibles...j'observe la sortie, j'observe la délivrance et la libération

Quant à toi, cadavre, je pense que tu fais un bon fumier et ne m'en offusque point,
Je sens le doux parfum des roses blanches qui s'épanouissent,
Je touche les lèvres feuillues...je touche les seins satinés des melons.

Quant à toi, vie, je crois que tu es le résidu de maintes morts,
Nul doute que je ne sois moi-même déjà mort dix mille fois.

Je vous entends murmurer là-bas, ô astres célestes,
Ô soleils...ô herbe des tombes...ô transferts et promotions perpétuels...si vous ne dites rien, comment puis-je dire quoi que ce soit?

De l'étang vaseux au fond de la forêt d'automne,
De la lune qui suit la pente abrupte du crépuscule gémissant,
Dansez, éclats de jour et de nuit...dansez sur les tiges sombres qui croupissent dans la fange,
Dansez au son de la plainte inarticulée des branches sèches.

Je m'élève au-delà de la lune...je m'élève au-delà de la nuit,
J'aperçois dans ce chatoiement blafard le reflet des rayons du soleil,
Et débouche sur le foyer immuable, au-delà de ses rejetons, grands ou petits.

(Walt Whitman, extrait // excerpt, Feuilles d'herbe // Leaves of Grass, trad. // transl. E. Athenot)

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